L’art-thérapie utilise la création artistique à des fins thérapeutiques. Elle permet au patient de prendre contact avec sa vie intérieure (sentiments, rêves, inconscient, etc.) et d’exprimer ce qu’il ressent autrement que par la parole.
Le geste créateur fait appel au corps, il sollicite l’imagination, l’intuition, la pensée et les émotions. Pour mieux comprendre cette discipline, nous sommes allés à la rencontre de Béatrice LOUP, art-thérapeute à Grandris.
Béatrice, pouvez-vous nous dire ce qui vous a attiré vers le métier d’art-thérapeute ?
J’aime le contact, le relationnel et j’ai le goût pour la peinture, l’écriture et la musique. Arrivée en 2005 sur l’hôpital et l’EHPAD de Grandris, j’ai d’abord été aide-soignante puis, suite à une reconversion, animatrice en service sécurisé. Mon cheminement personnel et professionnel m’a amené à m’orienter vers la médiation artistique et le métier d’art-thérapeute.
Comment pratiquez-vous l’art-thérapie ici à Grandris ?
C’est un métier extrêmement riche où le respect de la personne fragilisée est au cœur de toute interaction et le partage, au centre de l’activité.
Je travaille avec des patients en soins palliatifs ou des résidents dont certains ont des troubles cognitifs souvent avec mes collègues de l’équipe paramédicale et des soignants. J’anime notamment des ateliers au PASA.
Pour travailler, j’utilise tous les supports : dessin, peinture, collage, sculpture, travail de texte sur des images…le choix du média dépend du but recherché. Parfois, les résidents réalisent de grosses pièces comme les totems qui viennent décorer l’EHPAD et animer les espaces de vie.
Le but de l’art-thérapie est-il toujours le même ?
Non, bien sûr, il faut s’adapter aux personnes en fonction de leur pathologie, de leur histoire et de leur tempérament mais des notions demeurent en toute situation : il faut donner l’envie, le plaisir et créer une relation de confiance, je dirais même qu’il faut les aimer, sinon, cela ne marche pas.
Pour des personnes souffrant de gros problèmes cognitifs ou démentes, l’objectif est de les aider à lâcher-prise, à se poser et retrouver leur calme. Avec eux, on favorise le tactile.
Pour les autres résidents, le but de l’art-thérapie est de renforcer leur existence en les valorisant mais aussi de participer au deuil de leur ancienne vie. Avec eux, le travail d’écrit sur des visuels fonctionne très bien.
Enfin, pour les patients en soins palliatifs, je les rencontre sans aucun à priori et individualise totalement ma prise en charge. Dans ce cas en particulier, l’art a un véritable effet anxiolytique.
Quelle expérience vous a le plus marquée depuis que vous exercez ce métier ?
J’ai cet exemple dont je parle toujours avec beaucoup d’émotion, une femme, en fin de vie. Petit à petit, elle a repris goût à la peinture et allongée sur son lit, a réalisé des aquarelles pour toute sa famille.
Pour elle, il était important de laisser une trace, un souvenir très fort et visuel, c’était aussi une raison de vivre et de se concentrer sur autre chose que l’avenir.
Quels sont vos projets pour les semaines à venir ?
Il y en a plusieurs, mais un, en particulier, me tient à cœur. Il s’agit du projet « Derrière la fenêtre ». Il s’agit d’une mise en forme picturale par une illustratrice de textes écrits par des résidents. Ces textes, travaillés lors de l’atelier « des mots sur des maux » mis en place au moment du premier confinement afin de maintenir du lien et de lutter contre l’isolement, recueillent les ressentis des résidents sur cette période fortement anxiogène. Cet atelier a permis à plusieurs personnes de s’exprimer et de raconter leur vie.
Que diriez-vous à quelqu’un qui souhaite s’orienter vers le métier d’art-thérapeute ?
C’est un métier difficile sur le plan affectif. Il faut savoir se détacher et prendre du recul et j’avoue que parfois c’est difficile, cela s’apprend au fil des années de pratique et des rencontres. Mais ce métier est tout simplement passionnant et humainement, il apporte beaucoup à condition d’aiguiser son sens de l’écoute.